Younes Duret Design – Damasquinerie Artisanat

Damasquinerie?

Définition :

    La damasquinerie est l’art de la gravure sur acier ou sur fer, dont les tailles reçoivent ensuite des incrustations d’or, d’argent ou de cuivre formant de riches dessins et mosaïques.

Historique :

    Les Anciens connaissaient l’art de la damasquinerie, et Hérodote le nomme kollêsis. L’invention en était attribuée à Glaucus de Chio, auteur du cratère que le roi de Lydie Alyatte offrit au temple de Delphes. Les Romains appelaient cet art ferruminatio; dès le Bas-Empire, les peuples du Levant y ont excellé, principalement les habitants de Damas, et de là vint le nom donné à ce genre de travail. Les magnifiques portes de St-Paul-hors-les- Murs, à Rome, en bronze damasquiné, furent exécutées en 1070 à Constantinople. Un des plus beaux exemples de la damasquinerie orientale est le vase qui a servi au baptême de Louis IX, et qui est conservé au Louvre, dans le Musée des souverains.
    L’art de la damasquinerie, oublié pendant longtemps, reparut en Italie vers le XVe siècle, et il y fut cultivé avec beaucoup de succès; on enrichit d’élégantes arabesques les armures, les boucliers, les poignées et les fourreaux d’épées. On nomme ce genre de travail lavoro all’ Azzimina. Un des premiers artistes vénitiens de cette époque est Paolo, surnommé Azzimino. Viennent ensuite, à Milan, Giovanni-Pietro Figino, Bartolomeo Piatti, Francesco Pellizone, Martino Ghinelle, Carlo Sovico, Ferrante Bellino, Pompeo Turcone, Giov. Ambrogio, puis les armuriers Philippa Negroli, Antonio Biancardi, Bernardo Civo, Antonio, Federico et Luccio Piccinini, Romero, etc. Benvenuto Cellini fit des damasquinures dans sa jeunesse. Les Lombards excellaient à reproduire les feuilles de lierre et de vigne vierge; les Romains, celles d’acanthe avec leurs tiges et Ieurs fleurs, entremêlées d’oiseaux et de petits animaux.
    La damasquinerie commença à être pratiquée en France au XVIe siècle (La Renaissance); le bouclier et le casque de François Ier, qu’on voit au Cabinet des médailles de Paris, sont des œuvres remarquables, et, sous Henri IV, il y avait déjà de très habiles artistes, parmi lesquels se distingua, à Paris le fourbisseur Cursinet.
    Les musulmans de la Perse introduisirent le damasquinage à Tolède en Espagne. Ils travaillent principalement les broches et autres bijoux pour orner les danseuses espagnoles.
    Aujourd’hui, la damasquinerie est un art travaillé et apprécié par les Marocains. Cet art délicat est utilisé dans la décoration d’éperons, d’étriers, de gardes de sabres mais aussi pour la fabrication de vases, d’assiettes, bracelets, bagues, brûle-parfums…. Au Maroc, cet art de l’incrustation d’un métal dans un autre fleurit surtout à Meknès. Toute fois, il existe très peu d’artisans de damasquinerie. On en dénombre une petite vingtaine à Meknes, une des dernières villes dans le monde où ce métier d’art tente à perdurer.

Opérations de damasquinerie :

    La damasquinerie consiste à incruster dans le métal des fils lisses ou torsadés en cuivre, en argent ou en or. L’objet en fer est chaudronné et limé pour supprimer les traces de soudure. L’artisan chauffe la partie à incruster, et, avec un couteau en acier dur, prépare son dessin par des hachures grossières. En passant à travers la flamme d’un réchaud à gaz, l’objet prend une couleur bleuâtre qui permet à l’artisan de mieux discerner le dessin qui sera tracé avec le fil dans la matière précieuse choisie.
    En ce qui concerne le procédé d’incrustations, il existe plusieurs manières :

  • On peut simplement poser, en les fixant avec de la cire, les fils d’or et d’argent sur le dessin, en suivant scrupuleusement tous les détours, et, par la seule force du marteau, l’incrustation s’opère d’une manière suffisante; en pénétrant, le fil se soude au support.
  • On trace de profondes entailles au burin, et on y introduit des fils métalliques plus forts; le marteau achève l’opération ;
  • lorsqu’on a un métal moins dur que l’acier, le bronze par exemple, à damasquiner, on champlève le métal sur toute la surface de la figure à graver; on applique sur le fond une lame mince d’or ou d’argent, qu’on y fixe en rabattant au marteau les bords relevés des contours; puis on modèle les figures sur la feuille rapportée, au moyen des ciselets, des burins ou de poinçons à estamper.
  • Pour finir, l’objet passe une nouvelle fois au feu avant d’être poli, de préférence à l’aide d’une pierre d’agate. On plonge la pièce directement dans la forge pour lui donner cette couleur noire qui fait ressortir l’argent. Pour éviter l’oxydation, une huile minérale y est appliquée.

Étymologie et citations :

    Damasquin, adjectif formé de Damas, et damasquine, s. f. formé de damasquin et usité dans le XVIe siècle :

  • Incrustations industrieusement entaillées et enrichies d’une singuliere peinture et enluminure, dont le vernis à la damasquine faisoit sembler les parois estre de verre (YVER p. 522)
  • Ils chercheront le raccord de la damasquine [du moiré du placage] tellement qu’il semblera que toutes lesdites tables jointes ensemble, ne sont qu’une mesme piece (PALISSY 28)
  • L’eau teinte tombant sur la blanche, a fait plusieurs figures, idées, ou damasquinées en ladite pierre de jaspe (PALISSY 51)
  • Une robbe à la mode de Perse, longue, damasquinée et parfumée (MONT. II, 346)
  • Le bois d’erable est plus madré, figuré et damasquiné que nul autre bois (PALISSY 28)
  • Couvrez la tendre chair de vos greves divines Du cuir damasquiné de vos courtes bottines (RONS. 937)
  • Les Turcs ayment à avoir leurs espées qu’ils nomment cimeterres, non pas aussi luisantes comme les notres, mais damasquinées, c’est à dire ternies de costé et d’autre : par quoy les armuriers sçavent detremper du sel armonniac et verd avec du vinaigre dedens quelque escuelle, où ils mettent la pointe du cimeterre : lequel estant tenu debout, laissent couler de ladicte mixture tout le long du jour par dessus ; car cela mange un peu le fer ou acier, suivant la veine qu’il trouve en longueur, qui luy donne bonne grace, d’autant qu’on le brunist par après pour estre plus plaisant à la vue (DE LABORDE Émaux, p. 244)
  • On damasquinait [sous Charlemagne] le fer, on fabriquait le verre , VOLT. , Moeurs, 19
  • [Le vieux Omer eût donné] Tout, jusqu’au cheval blanc qu’il élève au sérail, Jusqu’au frein que l’or damasquine , V. HUGO , Orient. 21